Depuis la création de l’ordre le 19 mai 1802, le chef de l’État occupe la fonction suprême de grand maître de la Légion d’honneur, qu’il soit premier consul, empereur, roi ou président de la République. Ainsi, de Napoléon Ier à Emmanuel Macron, trente-trois grands maîtres se sont succédé en deux siècles d’Histoire.

Aujourd’hui, conformément au code de la Légion d’honneur, lors de chaque investiture marquant le début du nouveau mandat d’un président de la République, ce dernier est reconnu comme grand maître par le grand chancelier de l’ordre qui lui présente le grand collier de la Légion d’honneur en prononçant les paroles suivantes : 

Monsieur le président de la République, nous vous reconnaissons comme grand maître de l’ordre national de la Légion d’honneur

Demain, à la suite de sa réélection, Emmanuel Macron sera de nouveau investi dans la fonction de chef de l’État. Il sera donc nommé grand maître de l’ordre une seconde fois, l’occasion pour nous de vous expliquer en quoi consiste ce rôle de garant de la plus haute distinction française…

Les attributions du grand maître

En tant que grand maître de l’ordre de la Légion d’honneur, dès son investiture et pendant toute la durée de son mandat, le président de la République statue en dernier ressort sur l’ensemble des questions concernant les ordres nationaux, que ce soit la Légion d’honneur ou l’ordre national du Mérite, pour lequel il occupe également cette fonction. À ce titre, il fixe notamment les contingents annuels d’admission et d’avancement dans la Légion d’honneur, et ce pour une période de trois ans.

Elizabeth II, reine d’Angleterre, a été élevée à la dignité de grand’croix de la Légion d’honneur le 14 mai 1948 par le président Auriol

De plus, lorsque le conseil de l’ordre déclare recevables les propositions d’attribution de la Légion d’honneur émises par les ministres, il appartient au président de la République de les accepter ou de les refuser. Seule exception à cette procédure, le grand maître décide directement des attributions aux chefs d’État étrangers et à leurs collaborateurs.

Une fois que les propositions d’attributions sont acceptées par le président de la République, c’est également lui qui signe les décrets d’attributions publiés au Journal officiel de la République et, lors des cérémonies de réception dans l’ordre, si ce n’est pas lui qui le fait, c’est en son nom que sont remis les insignes aux récipiendaires. Le brevet attestant de la pleine appartenance du décoré à la Légion d’honneur est d’ailleurs revêtu de sa signature.

Le président Macron remet les insignes de la grand’croix de la Légion d’honneur au général François Meyer, le 20 septembre 2021

Enfin, sur proposition du conseil de l’ordre, il statue en dernier ressort sur les mesures de suspension ou d’exclusion à prendre à l’encontre des décorés condamnés en justice ou ayant commis des actes contraires à l’honneur.

Le grand collier de la Légion d’honneur

Dans ce portrait de Girodet, Napoléon Ier porte le collier dit « du second type »

En tant que grand maître, le président de la République dispose d’un attribut distinctif : le grand collier de la Légion d’honneur. Sous le Premier Empire, le collier n’était pourtant pas fonctionnel ; il était porté aussi bien par Napoléon Ier que par les princes de sa famille et quelques grands dignitaires. C’est sous la IIIe République et la présidence de Jules Grévy qu’est créé un nouveau collier qui devient l’insigne de la fonction de grand maître.

Le collier actuel, le quatrième depuis la création de l’ordre, a été réalisé en 1953 par la maison Arthus-Bertrand sur un dessin de Raymond Subes et André Arbus. Il a été remis pour la première fois au président Vincent Auriol, le 1er décembre 1953 et était systématiquement porté par le nouveau président lors de son investiture. Valéry Giscard d’Estaing a toutefois modifié le protocole en se faisant seulement présenter ce symbole de la présidence.

Avant 1974, les présidents de la République revêtaient le grand collier de la Légion d’honneur lors de leur investiture, ce qui fut notamment le cas du président Pompidou sur son portrait officiel
À partir de 1974 et l’élection du président Giscard d’Estaing, le président de la République se fait présenter le grand collier lors de son investiture

Le collier se compose de seize maillons, rappelant les seize cohortes de la Légion d’honneur créées par Napoléon Ier, et comporte en son centre le monogramme HP (pour « Honneur et Patrie », devise de l’ordre depuis sa création) auquel est suspendue l’étoile de la Légion d’honneur. Sur les maillons sont figurées les grandes activités civiles et militaires de la nation telles qu’elles étaient vues en 1953.

Les cohortes de la Légion d’honneur étaient une division administrative et territoriale visant à organiser la Légion d’honneur (illustration : Wikipédia)

Au revers, ces maillons portent les noms des présidents de la République, avec l’année de leur accession à la fonction de grand maître de la Légion d’honneur :

  • maillon de l’Architecture et de la Sculpture : 1947 Vincent Auriol
  • maillon des Œuvres sociales : 1954 René Coty
  • maillon de la Littérature : 1959 Charles de Gaulle
  • maillon de la Médecine et de la Chirurgie : 1966 Charles de Gaulle
  • maillon de l’Agriculture : 1969 Georges Pompidou
  • maillon de l’Union française : 1974 Valéry Giscard d’Estaing
  • maillon des Télécommunications : 1981 François Mitterrand
  • maillon de l’Aviation : 1988 François Mitterrand
  • maillon de l’Artillerie : 1995 Jacques Chirac
  • maillon de l’Infanterie : 2002 Jacques Chirac
  • maillon de la Marine : 2007 Nicolas Sarkozy
  • maillon des Blindés : 2012 François Hollande
  • maillon de l’Industrie et du Commerce : 2017 Emmanuel Macron
  • maillon de la Connaissance du monde : 2022 Emmanuel Macron
Le grand collier de la Légion d’honneur

Conclusion

Depuis la seconde investiture d’Emmanuel Macron, il ne reste plus que deux maillons vides sur le collier, à savoir « Musique et Peinture » et « Sciences ».

Si le quinquennat reste en vigueur, le collier subsistera jusqu’en 2037. D’ici là, vous pouvez venir l’admirer au musée de la Légion d’honneur et des ordres de chevalerie.